Ma première peinture murale d'un navire échoué - une expérience humaine

Découvrez le résumé d'une expérience humaine autour de ma première peinture murale de cette dimension, représentant un navire échoué et ses environs, réalisée à Barra da Lagoa au Brésil en début 2019.

Naía peignant une peinture murale représentant un fond marin avec poseidon, ue baleine
Naía peignant une peinture murale représentant un fond marin avec poseidon, ue baleine
détail d'une peinture murale représentant poseidon sur la coque d'un bateau échoué au fond de l'océan
détail d'une peinture murale représentant poseidon sur la coque d'un bateau échoué au fond de l'océan

Toutes les histoires ne sont pas jolies, même si elles nous enseignent.
Aujourd'hui, je me permets de vous conter sans filtre une expérience qui a été difficile, parmi d'autres, en tant que personne légèrement différente des autres. Je n'ai aucun regret et à l'époque, j'ai fait du mieux que je le pouvais, et j'en ressors avec quand même quelques bons souvenirs.

Cette fresque de 7m de long, la première que j'ai réalisée, est le souvenir que j'ai laissé à Barra da Lagoa après y avoir passé tant de temps. Peut-être a-t-elle été aujourd'hui repeinte.

La commande était de représenter un coffre à trésor, dans un monde marin. Le propriétaire souhaitait un univers marin, plus "masculin" que la fresque voisine représentant une sirène. J'ai donc décidé de conter l'histoire d'un navire pirate échoué au fond des mers, avec comme proue un Poséidon qui prend vie.

Le projet a été un défi humain, et je n'ai jamais pu le terminer de la manière dont j'aurais voulu le faire, par respect pour moi-même. Je l'ai avancé dans le maximum que je pouvais tolérer, par envie de satisfaire tous les passants qui m'encourageaient dans sa poursuite, et aussi par la difficulté de laisser un travail inachevé.

détail d'une peinture murale représentant une baleine et un banc de poissons
détail d'une peinture murale représentant une baleine et un banc de poissons
détail d'une peinture murale représentant untrésor échoué au fond de l'océan
détail d'une peinture murale représentant untrésor échoué au fond de l'océan
détail d'une peinture murale représentant poseidon sur la coque d'un bateau échoué au fond de l'océan
détail d'une peinture murale représentant poseidon sur la coque d'un bateau échoué au fond de l'océan
détail d'une peinture murale représentant un navire soumis à des vagues turbulentes
détail d'une peinture murale représentant un navire soumis à des vagues turbulentes

Voir le processus créatif sur instagram

Clic par Thamires Nunes

Je rencontrai le propriétaire de ce mur en rendant visite à une amie qui était hébergée contre services. Il a adoré mes peintures, et m'a proposé de loger dans une chambre qui était libre chez lui, en échange du lessivage, la rénovation, et réalisation d'une fresque sur le mur donnant sur la ruelle extérieure de chez lui, qui descend vers le canal.

La maison se situe dans un cadre idyllique, avec un accès direct à un ponton sur le canal, la vue sur le village et la mer au loin. A l'époque, je commençais déjà à souffrir depuis un moment de douleurs chroniques et autres joyeusetés, sans vraiment réaliser que ce que je vivais n'étais pas normal. J'avais cependant arrêté de boire de l'alcool, et ne supportais déjà plus les changements de rythme d'une vie de fête sans conséquences drastiques sur mon état physique. Je ne participais donc pas à la vie sociale intense de beuverie et autres substances poudreuses du lieu le soir; me levais tôt, faisais mon yoga sur le ponton, nageais pour me maintenir en forme; puis je me mettais au travail quelques heures par jour avant que le soleil ne tape sur la ruelle et me rende le travail impossible. J'estimais mon temps de travail (4-5h par jour) tout à fait correct pour un travail de volontariat.

Mon amie, qui logeait dans un studio indépendant en bas de la maison, recevait ses amis (blancs) régulièrement sans problème. Un après-midi, un ami à moi vint me chercher à bord de sa barque pour que nous allions ailleurs. À partir de ce jour l'ambiance décontractée changea. Alors qu'Alisson m'attendait amarré au ponton sans jamais avoir débarqué, je reçus un texto plutôt incendiaire du propriétaire me précisant que je n'avais le droit de recevoir personne. Je conclus que le voisin devait être missionné d'épier ce qu'il se passait, et s'était empressé de rapporter qu'une personne noire attendait dans une barque sur le ponton. Je répondis donc au propriétaire que mon ami ne faisait que m'attendre, sans moucher.

Le weekend suivant, le propriétaire me demanda de vider les lieux pour recevoir sa famille dans la chambre où je logeais. Soit. A la dernière minute, je trouvai donc une solution de secours. Lorsque je revins dans la maison pour poursuivre la fresque, j'appris par ma collègue qu'en réalité personne n'était venu dans la maison ce weekend là, et que j'avais évacué pour rien. Je demandais alors au propriétaire si il y avait un problème, ce à quoi il me répondit que non. Il revint quelques jours, me reprocha de ne pas participer aux fêtes, d'inviter des gens lorsqu'il était absent, ce qui était complètement faux. Puis, il me ressortit l'excuse une nouvelle fois de la visite de sa famille pour que j'évacue de nouveau les lieux. Je m'exécutai encore une fois, ressentant de la frustration, de l'injustice, et surtout en me doutant d'un autre mensonge parce qu'en réalité, je n'étais plus la bienvenue. Ce qui fut le cas, encore une fois, je m'étais débrouillée pour me faire héberger alors que la chambre était restée libre. Lors de mon retour, je lui demandai d'être transparent et de me dire le fond de sa pensée. Après lourde insistance, il finit par me dire que je ne travaillais "pas assez vite", que j'abusais de son hospitalité, que je recevais des gens sans son autorisation, et que je ne participais pas assez à la vie sociale. Cependant il était "content" de la tournure de la fresque et voulait qu'elle soit terminée, et me "tolérait" le temps qu'elle soit terminée.

À l'époque, je n'avais pas la force mentale de me défendre, et bien que je démentisse ce qui était faux dans ses dires, je ne fis guère plus; je décidai de me payer un logement dans l'hostel le plus proche afin d'avancer la fresque au maximum, bénévolement, sans rien raconter aux passants qui m'encourageaient et me remerciaient quotidiennement d'apporter de la couleur à la ruelle.

J'ai suivi mon objectif au maximum, même en étant victime d'intolérance, non pas pour satisfaire le propriétaire en question, mais pour les passants, et pour l'art de rue. Je remercie tous les amis qui m'ont accompagnée et soutenue dans ce processus, et cette première opportunité de peindre dans la rue !